Les Dark Patterns, ou “éléments de design douteux” visent à orienter ou manipuler le choix de l’utilisateur en ligne. Ils s’opposent à l’UX éthique et leur principe est simple : inciter l’utilisateur à faire une action qu’il n’a pas l’intention d’effectuer et, si possible, sans qu’il s’en rende compte. Le but est de collecter ses données personnelles, ajouter des produits dans son panier, lui faire passer plus de temps sur une interface ou améliorer le trafic du site, par exemple.
Le site darkpatterns.org en a répertorié 11 types :
Sneak into basket, l’achat surprise
Vous faites vos courses en ligne, et constatez qu’un produit s’est glissé dans le panier contre votre gré. Par exemple, vous achetez un ticket pour un évènement et découvrez finalement que vous avez aussi souscrit une assurance. Comment est-ce possible ? Via un algorithme qui coche automatiquement une case à un moment donné de votre processus d’achat.
Forced continuity, la perpétuation d’abonnements
Beaucoup d’interfaces proposent, avant de souscrire un abonnement payant, un essai gratuit de plusieurs jours. La perpétuation d’abonnement est le fait de débiter le compte de l’utilisateur dès la fin de la période d’essai sans l’avertir.
Roach motel, le piège
Vous avez souscrit une offre avec une facilité déconcertante : un numéro de carte et une adresse mail et le tour est joué. Le jour où vous souhaitez vous désinscrire, en revanche, le processus se révèle être un réel parcours du combattant.
Avec le processus de Roach Motel (dont le nom est emprunté à une marque américaine de pièges à cafards), l’interface espère en fait que l’utilisateur n’aille pas au bout de sa démarche de désinscription.
Privacy zuckering, la technique Zuckerberg
Rares sont les internautes qui lisent entièrement la politique de confidentialité d’un site, ses conditions d’utilisation, etc.
En vous inscrivant sur Facebook par exemple, vous n’avez certainement jamais lu sa politique de confidentialité, pourtant vous l’avez acceptée. Sachez que vous avez tout simplement offert vos données au réseau social, et qu’à tout moment elles peuvent être utilisées, voire vendues.
Price comparison prevention, l’impossibilité de comparer les prix
Les détaillants ont bien compris qu’en montrant deux produits quasiment similaires, l’un dont le prix est au kilogramme et l’autre à la pièce, il est difficile pour le consommateur de les comparer. Il est donc relativement simple d’orienter le client vers le produit souhaité, en jouant sur l’affichage des prix pour qu’il paraisse – à tort – moins cher qu’un autre.
Misdirection, le détournement d’attention
Généralement, on le retrouve sur les interfaces de paiement. Avec des jeux de couleurs ou un design particulier, l’utilisateur aura l’oeil attiré par l’option de paiement la plus chère, tandis que l’option standard sera plus difficile à trouver.
L’inversion des couleurs est souvent utilisée. L’utilisateur est habitué à voir du vert pour le “oui” et du rouge pour le “non”. Il suffit alors d’inverser ces deux couleurs pour inciter l’utilisateur à faire un choix contraire à sa volonté, potentiellement sans qu’il s’en rende compte.
Hidden costs, les coûts cachés
Les hidden costs sont les coûts imprévus que l’on découvre à la dernière étape du processus de paiement, par exemple des coûts de livraison ou des taxes.
Bait and switch, appâter et attrapper
En entreprenant une action sur un site avec une attente précise, l’utilisateur peut finalement obtenir un résultat totalement différent. Par exemple, au milieu d’un article, il sera confronté à un message “inscrivez-vous pour continuer à lire cet article”. Contraint d’entrer une adresse mail pour accéder à la fin du contenu, il aura finalement souscrit un abonnement à une newsletter contre son gré.
Confirmshaming, faire culpabiliser l’internaute
On le retrouve généralement lors de l’annulation d’une souscription ou lors d’une désinscription. Il s’agit cette fois-ci de jouer avec les mots pour faire culpabiliser l’utilisateur et qu’il se résigne.
Disguised ads, les publicités déguisées
Particulièrement présents sur les sites de streaming et de téléchargement, les publicités déguisées sont des faux boutons (par exemple “regarder en HD” ou “télécharger gratuitement”) qui redirigent finalement l’internaute sur une publicité. Si depuis 2016 Google est supposé bloquer ce type de pratiques, ce dernier n’est pas toujours efficace.
Friend spam, le spam de contact
Certains sites demandent des données pour améliorer l’expérience de l’utilisateur. Par exemple, on peut vous proposer de synchroniser vos contacts avec une interface telle que Facebook ou Linkedin pour pouvoir les y retrouver plus facilement. On peut aussi vous proposer de créer un compte sur un site en se connectant à l’aide d’un réseau social tel que Facebook. Ces deux actions paraissent plutôt sécurisées, mais donnent finalement accès à une liste de contacts à spamer.
Ces techniques de manipulation sont efficaces à court terme. Un internaute recherche avant tout un service simple, intuitif et transparent. S’il est trompé sur un site, il ne renouvellera pas l’expérience. Il est aussi du devoir des développeurs et UX designers de se poser les bonnes questions, et de convertir l’utilisateur par la confiance plutôt que par la force. Quoi qu’il en soit, les dark patterns sont amenés à disparaître progressivement, notamment grâce à la mise en place du Règlement Général de la Protection des Données (RGPD).